Classe sociale

Une classe sociale est un sous-ensemble d'une population qui se trouve positionnée en situation inférieure ou supérieure comparé à d'autres classes sociales.



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Concept sociologique - Concept et outil théorique marxiste - Marxisme - Stratification sociale

Une classe sociale est un sous-ensemble d'une population qui se trouve positionnée en situation inférieure ou supérieure comparé à d'autres classes sociales[1]. C'est un groupement spécifique représentant un macrocosme de faits ouverts, à distance, de division permanente, restant inorganisées, ne possédant que la contrainte conditionnelle[2]. Le sociologue Alain Accardo souligne que «la division des sociétés en classes est un phénomène éminemment complexe, présentant au plus haut degré la caractéristique de tout fait social : une existence double, à la fois dans l'objectivité et dans la subjectivité»[3]. D'où l'importance du respect d'une certaine neutralité pour traiter le sujet par le bon usage de la sociologie.

Une représentation humoristique de la hiérarchie sociale dans la société capitaliste.

Enjeux de la classe sociale

La classe sociale sert à comprendre le comportement d'un segment de la population. A chaque segment dont les limites sont choisies de manière arbitraire correspond un comportement lié à l'identité ainsi qu'aux intérêts de la classe.
À cause des implications politiques, l'anthropologie moderne tend à préférer la notion de segment de population à partir d'enquêtes et analyses multicritères.

Les classes sociales relevant d'un rapport antagoniste

Karl Marx[4] dans ses analyses de la société industrialisée a mis en évidence l'existence de classes sociales, groupements d'individus partageant des intérêts communs. Le nombre de ces classes sociales ne fut pas strictement défini. Cela dépend de ses ouvrages et de l'époque de leur rédaction. Le nombre reconnu variait de trois à sept. Dans son ouvrage Les Luttes de classes en France, il définit sept classes sociales[5] :

  • l'aristocratie financière
  • la bourgeoisie industrielle
  • la bourgeoisie commerçante
  • la petite bourgeoisie
  • la paysannerie
  • le prolétariat
  • le lumpen prolétariat

Mais Marx a toujours reconnu que les deux classes principales étaient le prolétariat, et la bourgeoisie capitaliste (propriétaire des moyens de production), qui sont les deux pôles antagonistes acteurs de la lutte des classes dans la société industrialisée. Il distingue la classe en soi (liée à une organisation objective) et la classe pour soi (liée à la conscience collective). Sa conception de la société a été inspirée par l'étude de l'histoire selon une méthodologie, la conception matérialiste de l'histoire. Ces oppositions, ces conflits d'intérêts, découlent d'une conception dialectique : toute chose a son contraire, ou alors n'existe que comparé à son contraire : Dominant/dominé inspiré de Friedrich Hegel[6]. Ces rapports de domination/soumission traversent les âges grâce à la transmission de la position sociale par héritage. Certains marxistes du XXe siècle, définissent actuellement une classe sociale comme une classe d'équivalence pour une relation sociale. A titre d'exemple, la relation "faire partie de la Catégorie socio-professionnelle des ouvriers" définit la classe sociale des ouvriers comme le segment de population (la totalité des individus) qui vérifient cette relation (qui font partie de cette Catégorie socio-professionnelle).

Le philosophe Louis Althusser approfondira l'idée de Marx[7] estimant que la formation sociale génère un invariant strutural qui la sur-détermine par le fait que comme hiérarchie de concept, elle procure la définition et l'ordre d'apparition des concepts (ce qui dénote une approche structuraliste de la notion de classe sociale).

Pour Jean Jaurès, qui suit Marx sur ce point, «le dispositif capitaliste, le dispositif de la propriété privée des moyens de production, divise les hommes en deux catégories, divise les intérêts en deux vastes groupes, obligatoirement et violemment opposés. Il y a, d'un côté, ceux qui détiennent les moyens de production et qui peuvent ainsi faire la loi aux autres, mais il y a de l'autre côté ceux qui, n'ayant, ne possédant que leur force-travail et ne pouvant l'utiliser que par les moyens de production détenus exactement par la classe capitaliste, sont à la discrétion de cette classe capitaliste. Entre les deux classes, entre les deux groupes d'intérêts, c'est une lutte incessante du salarié, qui veut élever son salaire et du capitaliste qui veut le diminuer ; du salarié qui veut affirmer sa liberté et du capitaliste qui veut le tenir dans la dépendance.»[8]

Pour Vilfredo Pareto, les classes sociales naissent de l'opposition de masse d'individus et des élites gouvernementales au pouvoir. Ainsi, tout pouvoir implique cette séparation antagoniste[9]. Il estime néanmoins que les groupes sont hétérogènes mais aussi les valeurs des individus. Il pense néanmoins que les élites changent ainsi par conséquent que les limites de cette séparation antagoniste.

Pour Nicos Poulantzas, l'Etat fait perdurer ces structures sociales par le fait que la classe dirigeante facilite les intérêts de la classe dominante. L'Etat est alors la condensation matérielle de rapports de forces entre classes[10].

Les classes sociales ne relevant pas automatiquement d'un rapport antagoniste

Pour Ralf Gustav Dahrendorf[11], les classes sociales ne relèvent pas automatiquement de rapports antagonistes ouverts. Les conflits d'intérêt génèrent une grande diversité de classes sociales. Le niveau de mobilité sociale qui entraîne une liberté de manœuvre rend les classes sociales respectant les traditions plus diffuses et diverses. Les conflits raciaux et de religion peuvent aussi générer des changements sociaux. Il part des principes de changements exogènes de l'histoire et d'envisageable renégociations au sein de la société.

Selon Henri Mendras[12], il existe des constellations de classes qui fonctionnent selon le modèle de la toupie. Les groupes sociaux sont strictement fluctuants et les constellations tendent vers la moyennisation et la structuration par classe d'âge. La diminution des capacités d'action autonome pousse en effet à la moyennisation des classes sociales. La classe moyenne devient une réalité sociologique (conscience de groupe) quand elle est animée par un sentiment d'appartenance à ladite classe et la volonté de faire survivre cette classe.

Pour Max Weber, les classes ne sont pas d'ordre social (fonction du prestige), ni d'ordre politique (fonction du mode de contrôle de l'Etat) mais d'ordre strictement économique, c'est-à-dire fonction du mode de distribution, des revenus et du patrimoine[13]. Cette idée est contredite par Joseph Schumpeter qui estime que la classe sociale naît de la fonction exercée[14] (on retrouve déjà cette idée chez Platon[15] comme parfait social).

Pour Maurice Halbwachs, les classes sociales ne sont pas automatiquement antagonistes mais forment des cercles concentriques selon sa théorie du feu de camp par la domination d'un modèle culturel orthodoxe[16]. L'instruction, la richesse et le niveau d'intégration forment des cercles concentriques générant des classes qui n'impliquent pas automatiquement des intérêts divergents[17].

L'existence même de classes sociales est aussi quelquefois contestée, au motif qu'une classe sociale nécessiterait une conscience de classe pour être définie[18].

Les classes sociales en France

Selon le sociologue Louis Chauvel, les classes sociales en France se présentent de la façon suivante[19] :

Il existe dans la société française des écarts de revenus importants, mais concernant le patrimoine, «l'espace entre les ouvriers et les cadres est béant»[20], le ratio entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres étant de 1 à 70[21]. Selon Louis Chauvel, «l'imperméabilité des classes» reste «un phénomène central»[22].

Sentiment d'appartenir à une classe sociale et situation comparé à l'emploi[23]
en % Actifs ayant un emploi Retraités Ensemble des adultes
A quelle classe avez vous le sentiment d'appartenir ?
La classe moyenne 42 36 40
La classe ouvrière 24 24 23
La bourgeoisie 3 7 4
Classe défavorisée 7 7 8
Classe privilégiée 8 5 8
Un groupe professionnel 11 11 9
Un groupe social 2 3 2
Autre 3 7 6

Notes et références

  1. Inspiré de William Lloyd Warner, Social Class in America, 1949.
  2. Georges Gurvitch, Groupement social et classe sociale, Cahiers internationaux de sociologie, vol. 7, 1949.
  3. Alain Accardo, Introduction à une sociologie critique. Lire Pierre Bourdieu, Agone, coll. «Éléments», 2006, p. 287.
  4. Karl Marx, Manifeste du parti communiste, 1848
  5. Introduction à la sociologie, Michel De Coster, 1992 - L'explication de Marx, p. 188
  6. Friedrich Hegel, Phénoménologie de l'Esprit, 1807
  7. Louis Althusser, Pour Marx, 1965
  8. Jean Jaurès, "Les deux méthodes", 26 novembre 1900.
  9. Vilfredo Pareto, trattato di sociologia generale, 1916
  10. Nicos Poulantzas, L'Etat, le pouvoir, le socialisme, 1978
  11. Ralf Gustav Dahrendorf, Classes et conflits de classes dans la société industrielle, 1973
  12. Henri Mendras, La seconde révolution française 1965-1984, 1994
  13. Max Weber, L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme, 1905
  14. Joseph Schumpeter, Impérialisme et classes sociales, 1951
  15. Platon, La république, livre III
  16. Maurice Halbwachs, L'évolution des besoins de la classe ouvrière, 1933
  17. Maurice Halbwachs, La classe ouvrière et les niveaux de vie, 1913
  18. Voir, d'une façon plus générale, «Middle-class : confusion de terme, confusion de concept», Futur Antérieur, n°22, 1994 par Christian Marazzi.
  19. Louis Chauvel, «Le renouveau d'une société de classes», dans Paul Bouffartigue (dir. ), Le Retour des classes sociales, Paris, La Dispute, 2004, p. 62 à 65.
  20. Louis Chauvel, «Le retour des classes sociales ?», Revue de l'OFCE, octobre 2001, p. 331.
  21. Louis Chauvel, «Le renouveau d'une société de classes», dans Paul Bouffartigue (dir. ), Le Retour des classes sociales, Paris, La Dispute, 2004, p. 62.
  22. Louis Chauvel, «Le retour des classes sociales ?», Revue de l'OFCE, octobre 2001, p. 344.
  23. Source, INSEE première n°979, juillet 2004, p. 4

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes


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