Antonio Gramsci

Antonio Gramsci était un écrivain et théoricien politique italien d'origine albanaise,. Membre fondateur, un temps à la tête du Parti communiste italien, il fut emprisonné sous le régime mussolinien.



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Naissance dans la province d'Oristano - Personnalité politique italienne - Communiste italien - Essayiste ou théoricien marxiste - Marxisme - Écrivain italien du XXe siècle - Sociologie politique - Histoire de la Sardaigne - Naissance en 1891 - Décès en 1937 - Prisonnier

Portrait d'Antonio Gramsci, vers 30 ans, au début des années 1920.

Antonio Gramsci (Ales, Sardaigne, le 23 janvier 1891 - Rome, le 27 avril 1937) était un écrivain et théoricien politique italien d'origine albanaise[1], [2]. Membre fondateur, un temps à la tête du Parti communiste italien, il fut emprisonné sous le régime mussolinien. Il a surtout étudié dans ses nombreux ouvrages et articles les problèmes de la culture et de l'autorité, ce qui en fait un des principaux penseurs de la tradition marxiste. Il oppose à la dialectique matérialiste une «philosophie de la praxis» ; sa conception de l'hégémonie culturelle comme moyen du maintien de l'État dans une société capitaliste a fait date.

Biographie

Fils de Francesco Gramsci (1860 - 1937) et de Giuseppina Marcias (1861 - 1932), Antonio est le quatrième de leurs sept enfants. Francesco est condamné le 27 octobre 1900 à cinq ans de prison pour péculat, concussion et faux en écriture publique. Privée de ressources, la famille passe plusieurs années dans la misère. Antonio fréquente l'école primaire jusqu'à l'âge de douze ans ; il travaille ensuite à l'Office du cadastre pour subvenir aux besoins de sa famille, qui n'est pas en mesure de financer son inscription au collège.

Le 31 janvier 1904, son père sort de prison. Réhabilité, ce dernier obtient un poste de secrétaire à l'Office du cadastre. Antonio peut alors s'inscrire au collège de la ville voisine de Santu Lussurgiu ; il obtient sa licenza ginnasiale (équivalent du BEPC) à Oristano, en 1908, puis entre au lycée de Cagliari, où il loge en compagnie de son frère Gennaro, qui travaille chez un glacier.

Gennaro part faire son service militaire à Turin, et rentre en Sardaigne converti au socialisme ; Antonio lit divers livres et revues socialistes, surtout les rédigés de Gætano Salvemini et de Benedetto Croce, mais également les romans populaires de Carolina Invernizio et d'Anton Giulio Barrili. À l'été 1910, après sa deuxième année de lycée, Antonio participe au quotidien L'Unione Sarda, grâce à l'un de ses professeurs, qui était directeur de ce journal. L'année suivante, il obtient brillamment sa licenza liceale (équivalent du baccalauréat).

À Turin

En 1911, ayant obtenu une bourse, il entame des études de philologie à l'université de Turin. À l'époque, l'industrie automobile s'implante massivement dans la région, et les firmes Fiat et Lancia embauchent la plupart d'ouvriers venus des régions les plus pauvres d'Italie. De nombreux syndicats sont créés, et les conflits sociaux apparaissent particulièrement vite. Gramsci fréquente les cercles socialistes dans lesquels se regroupent les émigrants sardes ; au cours de l'été 1913, il adhère à la fédération de la jeunesse du Parti socialiste, puis au Parti socialiste italien l'année suivante. Dès 1914, il rédige dans des revues socialistes comme Il Grido del Popolo ; s'intéressant à l'ensemble des aspects de la vie sociale et politique de Turin, il devient un journaliste connu : à partir de 1916, il participe à l'Avanti (organe du PS de Turin) où il tient une rubrique culturelle et politique.

Tombe de Antonio Gramsci à Rome.

À partir de 1915, il s'investit dans le combat politique au travers de la formation politique des jeunes ouvriers. Il prend part à l'insurrection ouvrière de Turin en août 1917, qui échouera faute d'organisation.

Il anime, à partir de 1919, le mouvement «conseilliste», qui préconise la création de conseils d'ouvriers dans les entreprises. La même année, il participe au lancement d'un nouveau journal, L'Ordine Nuovo, dans les colonnes duquel il expose l'obligation d'apporter aux ouvriers une éducation politique et culturelle, de réorganiser la société italienne et de construire une nouvelle culture socialiste. Cette préparation passe aussi par une transformation du Parti socialiste. Il faut mettre cette organisation sur le pied de guerre car une fois la marche vers la révolution enclenchée, soit c'est le Parti socialiste qui prendra le pouvoir, soit le pouvoir capitaliste fera tout pour éliminer par la violence toute forme d'organisation de la classe ouvrière. Secrétaire général du Parti communiste italien dès sa création le 21 janvier 1921, il en devient rapidement la référence intellectuelle. Il est élu député de Turin de 1924 à 1926 et crée le quotidien l'Unità. Il est arrêté par les fascistes le 8 novembre 1926 et condamné pour conspiration. À cette occasion, le procureur fasciste déclara : «il faut empêcher ce cerveau de penser».

En captivité, il rédige ses Carnets de prison. Malade, il meurt quelques jours après être sorti de prison, dans la nuit du 26 au 27 avril 1937. L'archevêque Luigi de Magistris, ancien adjoint de la Pénitencerie apostolique, rapporte que selon le frère d'une religieuse qui se serait occupée de Gramsci ses derniers jours, ce dernier serait mort en catholique, une affirmation non corroborée[3].

Pensée

Gramsci a rédigé plus de 30 cahiers durant son emprisonnement. Ces rédigés, connus sous le nom de «Carnets de prison» (Quaderni del carcere), contiennent ses réflexions sur l'histoire italienne, mais aussi des idées en principe marxiste, théorie critique et théorie éducative, telles que :

⁴ L'hégémonie culturelle

⁴ Le besoin d'encourager le développement d'intellectuels provenant de la classe ouvrière, ce qu'il a nommé «l'intellectuel organique»

⁴ L'éducation des travailleurs

⁴ La distinction entre la société politique et la société civile

Historicisme absolu

⁴ La critique du déterminisme économique

⁴ La critique du matérialisme philosophique

Hégémonie culturelle

Épicycle de la pensée marxiste qui pallie l'absence de la révolution prévue par Marx et le renforcement des institutions capitalistes : la bourgeoisie domine par la force mais également par le consentement, surtout par son hégémonie culturelle qui fait que le prolétariat adopte les intérêts de la bourgeoisie. L'Église catholique illustrerait par exemple cette hégémonie.

Intellectuels et éducation

Gramsci s'est intéressé de près au rôle des intellectuels dans la société, il disait surtout que l'ensemble des hommes sont des intellectuels, mais que tous n'ont pas la fonction sociale d'intellectuels. Il avançait l'idée que les intellectuels modernes ne se contentaient pas de produire du discours, mais étaient impliqués dans l'organisation des pratiques sociales.

Il établissait qui plus est une distinction entre une «intelligentsia traditionnelle» qui se pense (à tort) comme une classe différente de la société, et les groupes d'intellectuels que chaque classe génère «organiquement». Ces intellectuels organiques ne décrivent pas simplement la vie sociale selon règles scientifiques, mais expriment plutôt les expériences et les sentiments que les masses ne pourraient pas exprimer par elles-mêmes.

La obligation de créer une culture propre aux travailleurs est à mettre en relation avec l'appel de Gramsci pour un type d'éducation qui permette l'émergence d'intellectuels qui partagent les passions des masses de travailleurs. Les partisans de l'éducation adulte et populaire considèrent à cet égard Gramsci comme une référence.

Société politique et société civile

Plaque commémorative à Moscou.

La théorie de l'hégémonie de Gramsci est inséparable de sa conception de l'État capitaliste, dont il dit qu'il dirige par la force et le consentement. L'État ne doit pas être compris comme l'unique gouvernement, Gramsci distingue deux grandes parties : la «société politique», lieu des institutions politiques et du contrôle constitutionnel-légal (la police, l'armée, la justice)  ; la «société civile», lieu des institutions culturelles (l'université, les intellectuels) qui diffusent l'idéologie explicite ou implicite de l'état, dont l'objectif est d'obtenir l'adhésion sur des valeurs admises par la majorité. La première est régie par la force, la seconde par le consentement. Gramsci précise cependant que cette distinction est avant tout conceptuelle et que les deux sphères se recoupent fréquemment.

Gramsci affirme que, sous le capitalisme moderne, la bourgeoisie peut maintenir son contrôle économique en laissant la société politique accorder un certain nombre de revendications aux syndicats ainsi qu'aux partis politiques de masse. Ce faisant, la bourgeoisie s'engage dans une «révolution passive» par des concessions sur ses intérêts économiques immédiats, concessions qui s'avèrent en fait des modifications des formes de son hégémonie. Gramsci considère des mouvements comme le fascisme, le réformisme, le taylorisme et le fordisme, comme des exemples de ce processus.

Pour Gramsci, le parti révolutionnaire est la force capable de faire émerger des intellectuels organiques pour les travailleurs pour contester l'hégémonie de la classe dominante sur la société civile. La nature complexe de la société civile moderne veut dire que défaire l'hégémonie bourgeoise et conduire au socialisme est impossible sans une «guerre de position». Pour Gramsci, l'avènement du socialisme ne passe prioritairement ni par le putsch, ni par l'affrontement direct, mais par ce combat culturel contre les intellectuels de la classe dirigeante. Car si dans les régimes dictatoriaux c'est essentiellement la société politique qui fait l'oppression, il pense que dans les sociétés occidentales la société civile est une composante importante de la domination qui doit en conséquence être l'objet du combat.

Quoiqu'il soit complexe de tracer une ligne claire entre «société politique» et «société civile», Gramsci met en garde contre le culte de l'État qui découle de l'identification des deux, telle qu'elle est faite par les Jacobins et les Fascistes.

Historicisme

Comme le jeune Marx, Gramsci était un fervent partisan de l'historicisme. Dans cette perspective, toute la signification découle de la relation entre l'activité humaine pratique (ou «praxis») et les processus socio-historiques objectifs dont elle fait partie. Les idées, leur fonction et leur origine, ne peuvent être comprises en dehors du contexte socio-historique. Les concepts par lesquels nous organisons notre connaissance du monde ne dérivent en effet pas en premier lieu de notre rapport aux choses, mais plutôt des relations sociales entre les utilisateurs de ces concepts. Donc, il n'y a pas de «nature humaine» indélébile, mais uniquement des variations historiques. De surcroît, la science ne «reflète» pas une réalité indépendante de l'homme, elle n'est vraie que étant donné qu'elle exprime le processus en cours dans une situation historique donnée. La majorité des marxistes tenait par exemple pour acquis que la vérité est la vérité quels que soient le lieu et le moment de sa connaissance, et que le savoir scientifique (marxisme inclus) est accumulé historiquement et n'appartient par conséquent pas à la sphère illusoire de la superstructure. Pour Gramsci, cependant, le marxisme n'est «vrai» que dans un sens social pragmatique, au sens où en articulant la conscience de classe du prolétariat il exprime la «vérité» de son temps mieux qu'aucune autre théorie. Cette position anti-scientifique et anti-positiviste a été attribuée à l'influence de Benedetto Croce, probablement l'intellectuel italien le plus respecté de son temps. Il faut cependant rappeler que Gramsci insistait sur son «historicisme absolu» en rupture avec la teneur parfaitiste et hégélienne de la pensée de Croce et avec sa propension à maintenir une synthèse métaphysique dans la «destinée historique». Quoique Gramsci s'en soit défendu, sa conception historiciste de la vérité a pu être taxée de relativisme.

Critique de l'économisme

Dans un fameux article rédigé avant son emprisonnement et intitulé «La Révolution contre Le Capital», Gramsci affirmait que la Révolution russe en Russie invalidait l'idée que la révolution socialiste ne pouvait se faire avant le développement total des forces capitalistes de production. Cela renvoyait à cette conception par Gramsci du marxisme comme une philosophie non-déterministe. Gramsci insistait sur le fait qu'affirmer la primauté causale des relations de production était mal comprendre le marxisme. Les changements économiques et culturels sont les expressions d'un processus historique de base, et il est complexe de dire quel élément a la primauté sur l'autre. La croyance fataliste, fort répandue dans les premiers mouvements socialistes, en un triomphe inévitable à cause des «lois historiques» était, au point de vue de Gramsci, le produit des conditions historiques d'une classe oppressée réduite à une action défensive. Cette croyance devait être abandonnée une fois que les travailleurs étaient capables de prendre l'initiative. La «philosophie de la praxis» (euphémisme pour «marxisme» utilisé pour tromper la censure de la prison) ne peut pas considérer des «lois historiques» invisibles comme les agents du changement social. L'histoire est définie par la praxis humaine et implique par conséquent la volonté humaine. Cependant, la volonté ne peut pas aboutir dans n'importe quelle situation : lorsque la conscience des travailleurs atteint un niveau de développement indispensable pour l'action, les circonstances historiques seront favorables. Il n'y a aucune inévitabilité historique dans la réalisation de tel ou tel processus.

Critique du matérialisme

Parce qu'il croyait que l'histoire humaine et la praxis collective déterminent la pertinence de telle ou telle question philosophique, les vues de Gramsci vont à l'encontre du matérialisme métaphysique soutenu par Engels, quoique Gramsci ne le mentionne pas explicitement. Pour Gramsci, le marxisme ne s'occupe pas d'une réalité existant par et pour elle-même indépendamment de l'humanité. Le concept d'un univers objectif extérieur à l'histoire ainsi qu'à la praxis humaine est selon lui analogue à la croyance en Dieu. L'histoire naturelle n'a de sens qu'en relation à l'histoire humaine. Le matérialisme philosophique comme sens commun était le fruit d'un manque de pensée critique et ne pouvait pas, au contraire de ce que disait Lénine, s'opposer à la superstition religieuse. En dépit de cela, Gramsci se résignait à l'existence de cette forme plus grossière du marxisme : le statut du prolétariat comme classe dépendante signifiait que le marxisme, philosophie de la classe ouvrière, pouvait fréquemment s'exprimer sous la forme de la superstition populaire et du sens commun. Néanmoins, il est indispensable de défier efficacement les idéologies de classes éduquées, et pour cela les marxistes doivent présenter leur philosophie sous une forme plus particulièrement élaborée, et entreprendre une véritable confrontation avec les vues de leurs adversaires.

Critiques

Gramsci est particulièrement critiqué comme théoricien de l'entrisme. En attribuant aux bourgeois la volonté consciente de dominer les esprits des ouvriers, il justifie l'ensemble des moyens dont userait un parti prétendant défendre les intérêts de ceux-ci, malgré eux s'il le faut, comme la propagande ou l'entrisme.

Citation

Notes

  1. La piazza della Rivolta de Mario Brunetti, cap. II, pag. 31, note n. 1
  2. Le nom Gramsci vient du nom de la ville de Gramsh, au cœur de l'Albanie
  3. Gramsci est mort en catholique, soutient un archevêque italien[1]

Voir aussi

Liens externes

Bibliographie

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